Une année qui commence avec l'Irak et qui prend une couleur tout à fait particulière pour nous avec le grand mouvement des intermittents.
. Une question de Jean Raoul: si Chirac s'appelait Chiran mettrait-il autant d'élan à défendre l'Irak ?
On ne joue pas d’un instrument de musique, c’est lui qui se joue de nous.
Nous ne faisons des enfants que pour qu’ils nous fassent, in fine.
On prétend faire la guerre, mais c’est elle qui nous fait.
Que va-t-elle pouvoir faire de Bush et de Saddam qu’ils ne soient déjà :
les piteux Guignol et Gnafron d’un manipulateur cynique et criminel ?
30 Mar 2003
Réflexion de Camille sur l’actualité : « on a l’impression d’assister à une finale de coupe de panpantutue entre un club de première division et
un club de division d’horreur. »
13 Mai
. Pour tous ceux qui se préoccupent de leur retraite, le fameux ouvrage « Une retraite de réussie » de Napoléon Bonaparte, n'est toujours pas
disponible.
. organiser une cérémonie des Crespins à l'instar de celle des Molières où nous pourrions enfin nous autocongratuler tranquillement avec comme catégories: le crespin du grand déambulatoire, le crespin de l'entre et sort, le crespin des brigades, le crespin de l'innovation (ça va être dur), le crespin du jury (pour Délice Dada ou Ici même de préférence) , le crespin du spectacle "populaire" (de préférence non-subventionné), le crespin du jetable, le crespin du spectacle musical, le crespin du programmateur, le crespin de la scénographie, le crespin du spectacle en échasses etc... on devrait pouvoir tenir 2 jours comme ça.
. demander que chaque festival ait un conseil d'administration avec jetons de présence sonnants et trébuchants pour le recasage de nos grands anciens dans des conditions décentes. Alternative plus culturelle: fonder une académie des arts de la rue qui serait chargée de faire le distingo entre les festivals et les spectacles "arts de la rue" et les autres baptisés "populaires"
. ériger un "monument aux maires" en forme de pistolet où seraient inscrits dans le marbre les noms des grandes victimes de l'alternance. Déjà trois encoches au moins: Saunier-Borell, Palmira, Pierre & Quentin.
. organiser un grand concert hystérique où nous pourrions tous, sous la houlette de grands ténors qui se reconnaitront, crier notre indignation aux méchants pouvoirs publics et des commandos type Act Up pour contrer tout ce qui menacerait notre noble mission.
. transformer tous les contrats de programmateurs en contrats à vie et, en contrepartie, les obliger à prendre systématiquement les mêmes compagnies au moins une fois tous les deux ans (surtout la mienne).
. intégrer tous les artistes estampillés "arts de la rue" et sélectionnés par l'académie ci-dessus suggérée dans la fonction publique.
. lancer de grandes soldes des arts de la rue pendant le mois de janvier pour relancer le marché.
. relancer Intervilles avec Pascal Larderet aux commandes.
. Débaptiser "lieux publics" pour le renommer "les yeux du public" et virer d'urgence Pierre Sauvageot pendant qu'il ne se prend pas encore trop au sérieux.
.Remplacer France-Culture par France-Hors-les-Murs.
. Ne pas mettre tous les off dans le même panier
. Obliger tous les nouveaux arrivants à travailler au moins un an gratos à l'"Arbre à Nomades". ça devrait les calmer.
. Créer une section spéciale arts de la rue de "Touche pas à mon pote" sous la présidence de Jacques Livchine
. Débaptiser les Eclats d'Aurillac pour "le Songy de quelques nuits d'été"
. Organiser un Tour de France des arts de la rue avec Jean Raymond en tête de peloton. (est-ce que j'ai une tête de peloton ?)
. Interdire à l'année des arts de la rue d'avoir une fin!
Ces accords à peine signés font couler un max d'encre et de salive . L'épée de Damoclès a cassé son fil. Evidemment que ça nous fout dans la merde mais on s'y attendait non ? et croyions-nous réellement à un maintien du statu quo ante ? et quelle que soit la manière dont ce statut est grignoté pouvons-nous de toutes façons être d'accord ?
Toutes questions qui me tirlipotent
Une remarque cependant a propos des nouveaux accords -que je ne cherche pas particulièrement à défendre et pour cause- mais dont un point au moins me semble une avancée réelle dans le sens du réalisme: les heures d'enseignements et stages pourront être comptabilisées dans les heures sans être obligées de se déguiser sous forme de cachet. J'en connais pas mal que ça va arranger.
. NON l'été culturel 2003 ne sera pas sacrifié puisque Philippe Rives et la Bk Ci(n)e vont jouer à Chalon cet été. Ouf! On est rassuré!
. Je suis assez fasciné par le barouf du tamtam pro sur nos listes et nos portables et de l'atonie par ailleurs du reste de la population. Ne serions-nous donc pas une grande cause nationale ?
. Il est assez rigolo de voir revenir chez nous le grand clivage des purs et des durs contre les pourris et les nantis. Grévistes contre non-grévistes, rouges contre jaunes. Ceux qui n'ont rien à perdre contre ceux qui en ont un peu.
. Pour sa part la Chorale de St Fulbert a fait au début de chaque spectacle un sleep-in de 15 minutes avec explication de texte et participation couchée du public. D'après les questions d'après-spectacle, le message a eu l'air de porter et , en plus, ça nous a fait du bien.
. Comme toujours lors de ce genre de mouvement on se pose la question si on va se comporter d'abord en artiste ou en militant. Et je me répète que l'intermittence n'est pas la culture même si elle y contribue.
. A mes amis purs et durs dont j'envie l'exaltation, je souhaiterais dire qu'il n'est pas nécessaire d'adopter des conduites suicidaires pour obtenir des résultats. Au plus fort des luttes syndicales les mineurs n'ont pas fait sauter leurs mines, les paysans sauter leur terre et les cheminots sauter les lignes. Nous avons un outil de travail fragile comme un môme pour la plupart, ce sont nos compagnies et la laborieuse maturation qu'elles représentent. Je ne vois pas l'intérêt de les sacrifier sur l'autel du Medef pas plus que de se bruler en place publique. Parmi les outils sont aussi les festivals et manifestations, et iceux ne sont pas tous à la même enseigne. Il sera contreproductif d'attaquer tout et sans discernement. La grève est une connerie si elle ne ne repose pas sur une stratégie. C'est peut-être dommage mais c'est comme ça.
. La teneur des messages que nous colportons dans nos actions est d'une pauvreté politique des plus affligeantes. Elle est même en totale régression puisqu'elle attend de l'état régalien qu'il nous dispense sa protection alors que les décisions sont du domaine paritaire. Nulle part (et si existe, qu'on me le fasse parvenir SVP) je n'ai lu un contre projet cohérent. Si l'on veut remettre les choses sur la table, ce ne peut être sur de simples admonestations fussent-elles basées sur cette conviction romantique que nous sommes le sel de la terre et que sans nous ça va être fade.
. Qui sommes nous ? Qui nous représente ? le SFA/CGT ? Elle n'a signé aucun accord depuis le début de l'intermittence. C'est crédible ? Je ne me sens pas représenté par elle, pas du tout.
. Ces accords ne sont pas bons d'abord parce qu'ils n'ont pas été signé par les gens concernés et la CFDT a eu grand tort d'y apposer son paraphe. C'est même tout à fait anti-démocratique qu'une décision sociale soit prise sans même la prise en compte des principaux concernés.Il nous faut être dans ces discussions tant au niveau patronal qu'au niveau "travailleurs". C'est le premier point que je demanderai concrètement: un report des décisions pour qu'ils se fassent avec nous. A nous entretemps de nous créer une coordination nationale avec des représentants et activer très sérieusement la mise en place des sydcars.
. Sur le fond nous pouvons nous désolidariser des directeurs artistiques de CDN ou de scènes nationales qui gardent le statut d'intermittent tout en étant salariés, de même pour certaines productions audiovisuelles auxquelles il serait nécessaire d'interdire l'usage d'intermittents dans des conditions précises. En clair: balayons les abus parce que ces abus nous tuent. Par ailleurs on peut accepter de durcir un peu les conditions d'accès si le jeu en vaut la chandelle: l'intermittence pour tous et aveugle ne nous rend aucun service et ça fait par trop RMI;
. En ce qui concerne l'action de l'état et la nécessité pour le pays de maintenir une profession en état de fonctionnement correct, je serais assez pour qu'il agisse envers les spectacles vivants comme il fut naguère pour le cinéma, une partie des rentrées des cinémas alimentant la production nationale. En l'occurence pourquoi les droits de rediffusions télévisuels, tous salaires et frais de productions duement payés ne contribueraient-ils pas pour tout ou partie à l'entretien de ce grand corps qui fabrique de la culture tous les jours ? C'est une idée qui vaut ce qu'elle vaut mais bon...
. Comme beaucoup d'entre nous (mais pas tous, loin de là) je suis intermittent et les assedic me permettent de faire face aux coups durs, de préparer les spectacles à peu près sereinement, et de faire vivre décemment mes 4 mômes. Ils ne sont pas mon revenu et je ne souhaite en aucun cas qu'ils le soient. Je supporte mal cette épée de damoclès que nous avons au dessus de nous avec un statut fragile et perpétuellement remis en cause. Nos actions me font penser aux manifs pour la retraite avec comme seul but de repousser un peu le moment de la douloureuse. Nous avons besoin de quelque chose de stable pour choisir et construire nos vies. ça ne sert à rien de jouer aux autruches. Le système dans lequel nous vivons impose un certain équilibre financier et notre profession pas plus qu'une autre ne peut en faire l'économie. Alors abordons le clairement et sans hystérie inutile.
. Et s'il s'agit de remettre en cause ce système dans sa globalité, je suis d'accord mais pas pour mes raisons de croûte.
... sur l'impact des mouvements de ce w-e. Le 8/9 de France Inter entièrement consacré à l'Intermittence avec de lumineuses interventions d'Ariane Mouchkine. Au hit parade des mouvements évoqués lors de cette émission: le Chatelet, Montpellier et Caen qui emporte la palme question efficacité. Rien sur Sotteville. ça va très mal du côté organisateurs de festival qui se demandent à quelle sauce ils vont être mangés.
. résumé des revendications: refus de l'accord et demande de renégociation
. la question est comment maintenir la pression sans s'auto-asphyxier.
. Une remarque sur les accords signés le 26: ils sont encore une fois provisoires jusqu'en 2005. On dirait que même les accords sont intermittents!
2 Juil: Légende du Pays Conchon
. Il était dans un appartement un oiseau qui chantait pour un enfant. L'oiseau chantait fort, mangeait dru, buvait sec et l'enfant était content. Mais il prenait de la place dans l'appartement alors les parents le mirent dans une cage plus petite. L'oiseau se sentait à l'étroit mais il aimait tellement chanter qu'il continua comme si de rien n'était. Et l'enfant ne remarqua rien. Et comme l'oiseau mangeait beaucoup, bien trop pour vocaliser, les parents décidèrent de le rationner. Et l'oiseau aimait tellement chanter qu'il protesta en chantant mais l'enfant ne remarqua rien. Lorsqu'on oublia de lui donner de l'eau, l'oiseau gémit mais il continua sans lésiner. Lorsqu'on recouvrit sa cage d'un voile pour ne pas le voir trop souvent, l'oiseau ne cessa pas son chant même si c'était un peu désespéré. Alors on continua à le rationner parce qu'un oiseau, ça n'est guère plus qu'un poisson rouge avec des ailes, sauf que ça fait du bruit quand on écoute la télé. Et un jour, l'oiseau qui aimait tellement chanter ne le fit plus. Et comme il persistait, les parents dirent qu'ils ne marchait pas et jetèrent la cage. Et comme pour faire une pierre deux coups, l'enfant peu à peu se tut et s'enferma dans le silence.
Depuis, on entend beaucoup mieux la télé.
- me résoudre au fait que notre mouvement s'alimente de propos excessifs, de trafiquages de chiffres, d'hystéros "montagnardes", de simplifications idiotes, de paniques irréelles, de procès caricaturaux, de suicides inutiles, d'exécutions abusives, de mesquineries déguisées au nom de l'efficacité ?
- trouver jolie la pièce parce que tout le monde en parle ?
- régresser comme un môme parce que le gentil guignol-intermittent veut bastonner les méchants Gnafrons Medef/chérèque/Arpaillon ?
- adhérer à ce discours de merde qui prétend qu'intégrer des bénévoles dans un spectacle est anti-social ?
- taire le fait que si le nouveau-statut est un peu moins confort il reste le meilleur du monde et que, s'il favorise ceux qui bossent beaucoup, le précédent ne le faisait pas moins ?
- me sentir solidaire des intermittents qui font de la figuration dans les émissions télé parce que le public payé c'est beaucoup plus controlable ?
- me réjouir qu'Hervée de Lafond, dans son interview sur France Info, propose que le ministère comble le trou des intermittents, ce qui est exactement la position du Medef - ce qui ne veut pas dire pour autant que c'est nul- ?
- oublier que la solidarité ça ne se pratique pas à sens unique (le public avec nous) et que si nous contribuons à déséquilibrer le régime de l'Unedic c'est l'ensemble des salariés qui sera touché ?
- ne pas déplorer le bordel des mots d'ordre parce que, grâce à ce déclencheur mesquin de la défense de notre mode de vie, enfin on parle de culture dans des termes réalistes (apports économiques et sociaux) ?
- rappeler que pour moi s'il y avait à choisir entre les subventions et les indemnités assedic il faudrait et sans hésitation choisir ces dernières parce qu'elles ne dépendent pas de la bonne volonté du maître ?
- prendre les déclarations de solidarité pour argent comptant, quand on sait que beaucoup de ces solidarités affichées sont d'abord des moyens de se protéger ?
- consoler Daniel Andrieu et François Ducourtioux entre autres, dont j'imagine qu'ils en ont bien bavé, en leur disant que dorénavant ils pourront aussi taper à la porte du Ministère du Tourisme et celui de la Solidarité (ou son remplaçant) pour compléter leurs budgets puisque l'idée est enfin avérée que leurs manifestations contribuent à l'économie de la région et l'intégration sociale de la jeunesse ?
- ne pas penser à tous ces artistes qui ne sont pas intermittents et ne travaillent pas moins ?
- refuser à perpétuité cette loi commune qui veut que lorsqu'on se lance dans un métier sans arriver à y faire son trou, en général on change ?
- ne pas me sentir gêné quand je vois notre chouette bande de gentils zintermitants pleurer sur son sort au nom des valeurs supérieures de la culture dont ils sont bien sûr les plus ardents zélotes en y croyant très fort ?
- ignorer que notre public n'est pas fait de nantis, que parmi les fanas des zaccros de la rue, il y a des smicards à vie, que pour les accrocher il a fallu en chier et que c'est bien dommage qu'ils en fassent les frais ?
- noyer mon sens critique dans ce grand woodstock solidaire où chacun se saoule de ses propres mots ?
- ne pas me sentir touché par le sabordage de l'ARFI, une des structures associatives les plus inventives de ces dernières décennies ou par ces grèves généreuses mais imprudentes et vaines de compagnies dont j'estime le boulot ? kifkif pour certains festivals alors qu'il est patent que Chalon se fera parce quand même laisser un festival en grève c'est comme vendre une maison occupée, ça donne moins de valeur pour les indemnités ?
- accepter que mon ordi soit encombré par 10 reprises du message d'Olivier Py (encore s'agit-il là d'une prise de position intéressante), 43 questions oiseuses et commentaires douteux de BKssine, 75 appels à l'assaut et 200 règlements de compte ?
- ne pas augurer que la victoire de nos revendications sera et forcément une victoire à la Pyrrhus ?
- ne pas dire que "la psychanalyse du singe" récemment envoyée me hérisse le poil, que c'est du Robespierre à peine déguisée ?
- ne pas me demander si nous sommes en pleine révolution ou dans une gigantesque branlette collective ?
- fermer à fond ma gueule sur toutes ces questions parce qu'enfin ça bouge et qu'on parle de nous et que ce gouvernement que nous avons contribué à faire élire par des votes douteux, surtout au premier tour (ou des non-votes aussi), a soi-disant chaud aux fesses ?
Ya du pour ! ya du contre !
Je hais les lynchages et je trouve dégueulasse celui de la CFDT quoiqu'on puisse penser de sa maladresse et de son outrecuidance
Je ne fais pas confiance à ce gouvernement expert en manipulations et poudre aux yeux (encore qu'en Corse on en voit les limites) pour autant, je le dis, Aillagon n'est pas le con qu'on dit et ses propositions si elles arrivent tard (comme l'arrestation de Colonna) ne sont pas toutes dénuées de bon sens.
Nous autres baltringues sommes hyperminoritaires dans toutes les instances qui discutent actuellement (cgt/syndéac sans parler des instances patronales) et j'ai bien peur qu'une fois le soufflet retombé nous ne soyons ceux qui y perdent le plus de plumes.
Je me réjouis des résultats de ce qui a été fait, quelle que soit la manière, et sans doute après celà, plus rien ne sera comme avant quand on dira le mot: culture. Mais l'issue à cela est davantage politique que syndicale et je ne le répèterai jamais assez: quoiqu'en disent les chacals et hurleurs de tous poils, maintenons la pression mais avec cette obsession bien carrée dans les fesses: DURER
Acidument vôtre!
PS: petit rappel historique: lors de la guerre d'Algérie, les plus intransigeants dans le refus de toute évolution avaient sagement rapatrié leurs biens dans la métropole. Ce sont ceux qui y ont cru qui se sont fait blouser. Itou en Nouvelle-Calédonie où le même scénario se mettait en branle quand les accords de Matignon ont fait cesser le carnage. Les plus intransigeants ne sont jamais ceux qui ont le plus à y perdre!!!
. malgré le concert d'annulations de manifestations qui règne dans notre beau pays, les Comices Agricoles de St Fulbert auront tout de même bien lieu. Les vaches n'ont pas rejoint le mouvement.
Le collectif de compagnies "toujours vivants" prend peu à peu de l'ascendant. Aujourd'hui chacun joue ou ne joue pas, personne n'intervient. Des commissions préparent l'occupation artistique de la ville pour la prochaine semaine, d'autres troupes et d'autres arts sont invités à venir rejoindre le mouvement; les inquisiteurs ont disparu et personne ne les regrette.
Et si ce beau rêve se réalisait ?
Il ne tient qu'à nous sans doute et c'est assez exaltant.
Imaginez un spaghetti géant de 145m de long dressé dans le bleu du ciel. Une gigantesque banderolle" Restons vivants" est posée sur la berge de la saône. Sur le fleuve, trois canots de survie. Le spaghetti se fait fouet au ralenti et frappe les canots et les nageurs autour. Une allégorie splendide concoctée par Xavier Juliot.
On pense à Dali, à des images virtuelles. On est là sur la berge et nous qui avons beaucoup crié, agi, paradé, nous contentons de regarder. Une parenthèse esthétique.
Nous partons très serrés dans un bourdon de voix. Démarche lente, recueillie. Arrivée sur la place de l'hôtel de ville, chacun va se positionner le dos à la mairie, reprenant la position de l'armée de l'art. On se met les cagoules. Premier discours (cf mel suivant) suivi de l'allocution traditionnelle et ultime de Jean Georges se concluant sur ces mots: "des maires, des vous..."
Chacun ôte sa cagoule et , cérémonieusement, va l'offrir à quelqu'un du public.
Une chalonnaise lance le compte à rebours. Le cri part. Fervent. Senem Biyici, chanteuse turque récemment installée à Chalon, lance un bourdon et improvise dessus, bientôt rejointe par des musiciens, dix minutes de grace et d'émotion, on sait que beaucoup vont partir ce soir ou demain. Je pense à tous ceux qui ont été là cette semaine et qui sont partis plus tôt: métallovoice, quidams, l'unité, carabosse, générik, la lisa, le graall, transe express, j'en oublie certainement.
Le collectif "Les Vivants" récemment crée et qui regroupe artistes et habitants de Chalon, propose un Art-péro, place de l'hotel de Ville. Coïncidence, nous aprennons que la bande à Lubat, organise exactement la même chose au même moment, ailleurs...
Le repas du soir rassemble artistes, techniciens et ceux qui nous ont suivi de près. Pas de paroles officielles, ça tchatche dans tout les coins, on s'échange des adresses. ça fait fin de colo mais on s'en fout...Chalon 27: LA SUITE
. Un certain nombre de compagnies et d'individuels nous ont quitté. Chacune, au cours de ses tournées, qu'ils jouent ou ne jouent pas, continuera le cri dans les villes où ils passent entre 19h30 et 20h
. Nous nous sommes réunis ce matin, nous étions une grosse vingtaine. Les tâches se répartissent. Les sentinelles sont en place et l'action et le cri continuent. Les troupes qui passent dans le coin ou peuvent s'investir quelques jours seront accueillies. Je rappelle l'adresse mel: appelchalon@tiscali.fr Certaines ont déjà annoncé leur arrivée et ça ne fera pas de mal. Nous allons faire un cri crescendo ce soir, à partir d'une seule voix -"la" sentinelle de l'armée des arts- rejointe par les autres et comme il pleut, nous écrivons RESTONS VIVANTS sur 14 parapluie -ça fera plaisir à Jacques-. Sinon, nous maintenons la possibilité d'attentats artistiques plus ou moins spontanés.
. L'Occupation artistique de Millau se met en place, toute personne intéressée est invitée à contacter la permanence.
. La pré-occupation artistique d'Aurillac (donc au moins une semaine avant le festival) commence à être colportée et appuyée.
. TF1 voulait venir aujourd'hui mais nous avons mal maitrisé la diff des infos et ils ne viendront pas finalement. Une intox ratée dommage.
. J'ai eu une discussion avec la coordination des intermittents d'auvergne, menée par les Jolis Mômes qui ont une vision politique radicale du mouvement et parfaitement cohérente même si on peut ne pas la partager, ce qui est mon cas. Nous sommes convenus de faire le maximum pour trouver des terrains d'entente afin d'éviter le déchirement de Chalon. La semaine prélable ne sera pas de trop pour ça. Au moins sommes nous d'accord sur un point: AURILLAC ne peut pas se passer normalement. Le but est d'avoir le maximum d'effet politique en évitant de faire trop de dégats dans nos troupes déjà très fragilisées;il faudra être inventif.
. Un outil de liasion et d'information se met en place avec Philippe, l'adresse en est: www.restonsvivants.org
. Je vous invite en attendant à aller visiter le super travail de recoupement d'Yffic sur le site du fourneau ainsi qu'une revue des presse très complète et assez fournie.
. Je pars demain et les compte-rendus viendront d'autres...
8 aout: MOURIR A AURILLAC
. Ce que j'aime avant tout dans Restons Vivants c'est que nous sommes réunis par des questions bp plus que par des réponses. L'indécision, la contradiction, le malaise, eh bien voilà nous y sommes en plein.
. Le protocole est agréé. Il va falloir songer à se reconvertir. Le théatre de l'Unité va enfin pouvoir devenir autrechose, 26000 découverts, aux Puces s'y reconvertir, ex nihilo va y retourner, Transe sera omnibus, kumulus fera de l'eau froide, les goulus deviendront anorexiques, les quidams retourneront à l'anonymat etc. etc. Des jours exaltants nous attendent. Et cependant le conseil d'état est saisi, fragile espoir...
. ça me tue le fragile espoir.
. La grève est avant tout un outil de lutte syndicale. Rarement de lutte politique. Le problème est que certains d'entre nous se situent uniquement syndicalement, d'autres politiquement, d'autres entre les deux. Quand passons-nous du syndical au politique ?
. Restons vivants serait donc un mouvement politique ?
. Il mouille sa chemise le Michel de Joli Môme, c'est sûr et ce qui me frappe dans ce qu'il dit c'est: "les mecs, ils se foutent de notre gueule avec ces pseudos grèves, ces solidaires qui ne grèvent pas, on a l'air ridicule, si Aurillac ne grève pas Avignon n'aura servi à rien". Michel il a un tas de potes qui nous donnent des bons points entre vrais militants et tas de fiotes. Qui a besoin d'un label ?
. On devrait se faire une confédération artistique, nous les laboureurs du trottoir, c'est sans doute ce qui nous collerait le mieux.
. Si Aurillac ne sert pas à mettre sur pied un grand mouvement culturel, je ne vois pas l'intérêt d'en être. Il FAUT INVERSER LA PYRAMIDE DU CULTUREL, avec les CDN en bas.
. Je rêvais d'un Aurillac où tout le monde porterait le brassard noir du veuvage, où tout le monde jouerait et où, après chaque représentation, lors des saluts, des hommes en noir viendraient flinguer symboliquement un tiers des artistes.
. C'est jubilatoire et assez génial, ces compétences qui se sont mises ensemble pour lutter dans les coordinations, le corps est consistant, les esprits tendus, les grèves se nourissent de grève et la conviction de conviction... mais comme dit Bashung: "c'est comment qu'on freine ?". Faut-il mourir ? je pense à Brassens soudain.
. Qui va mourir à Aurillac ?
le mouvement, comme un vague ? les compagnies ? nos illusions ? les arts de la rue ? le festival ?11 aout: Gardarem lou moral
. Comme nombre d'entre nous j'imagine, je reçois un tas de mels qui transitent par des listes différentes. Qu'on me pardonne donc de répondre sur le tas...
. C'est fou le nombre de contributions intéressantes qui circulent sur le net, j'espère qu'un maniaque attentif va les conserver pour l'avenir parce que c'est difficile de les lire avec l'attention nécessaire: achoppements d'actualités, canicule, tournées, ça ne facilité pas les choses.
. Merci à Jeff pour son analyse de Restons Vivants... ça nous donne du recul et de la perspective, c'est intelligent, ça pourrait être homérique mais Jeff n'est pas aveugle, tant mieux. Merci à Pierre Sauvageot pour son utile résumé des épisodes précédents. D'accord pour le code de respect des uns et des autres mais je crois qu'il est déjà en cours. En fait l'histoire va vite, elle n'a pas besoin de nous de façon déterminante; initiatives, questionnements et toutes choses donnent l'impression d'aller n'importe où et finalement ça prend un sens. Georges a raison de s'interroger sur la pertinence de Restons Vivants à Aurillac, abordons cette échéance comme si rien n'était évident, ça nous donnera de l'imagination pour improviser et de l'humilité pour écouter.
. Et donc, la phase syndicale du mouvement des intermittents est en phase d'achèvement. Le gouvernement, fidèle à la voix de son maître, est prêt à tout accomodement qui ne remette pas en cause le sacrosaint MEDEF, le contrat entre iceux est béton et ce n'est qu'un début sans doute. Et donc en cette occurence l'appel à des Assises Nationales de la Culture ressemble fort à une grotesque diversion, un jeu apéro du club-med, une opération promotion de vaseline, et notre ministre plus à un Monsieur Loyal de la culture plus qu'à un vrai ministre.
. Et pourtant, il y aurait à demander, il y aurait à recréer, le diagnostic du docteur Livchine sur les 14 maladies est patent là-dessus et il est pour moi urgent qu'on le suive sur ce point. Sauf, sauf qu'évidemment si on rentre dans ce domaine, nous allons fissurer ce front uni anti-protocole qui nous faisait tant chaud au coeur.
. Si nous, -fédé, coordinations etc...- répondons présent à ces Assises c'est pour y être virulents et radicaux dans les demandes. ça veut dire bousculer des baronnies, jeter des tas de notables aux horties, donner de l'air enfin.... c'est du pugilat en perspective et pas question d'être tendre là dessus. Faut que ça saigne!
. Un statut de l'artiste du spectacle vivant, c'est un clone obligatoire de ce que nous donnaient les annexes 8&10. Qu'on cesse de penser que les spectacles pourront être payés ce qu'ils coutent. Connerie insondable qui va nous condamner à des jauges de show-biz à très brève échéance. Les droits de rediffusion peuvent payer pour le cinéma ou l'audiovisuel. Le spectacle vivant a besoin d'autre chose parce que ses retours sur investissement sont nettement plus subtils et à long terme, tant en terme d'intégration, d'irrigation que de structuration. Jouer pour des jauges de 300 spectateurs ne sera jamais rentable pour des calculs qui privilégient les profits financiers sur les profits humains. Discuter du statut des artistes et techniciens du spectacle vivant revient donc à exiger ce que nous avons en partie perdu en élargissant les fonds qui en permettaient le fonctionnement. Ce qui donne leur pleine pertinence aux propositions Wallon & Aparis, utilement rappelés par P. Sauvageot.
. Et tant qu'à faire, pensons à un statut de l'artiste européen, voire mondial.
. Le communiqué du Personnel d'Aurillac me semble particulièrement bien venu en ces temps. Merci à eux de tout coeur.
. Je serai à Aurillac le 14, je ne sais au juste pour faire quoi, mais l'improvisation nous a plutôt réussi jusque là et ça doit continuer. Par contre je cherche des tuyaux pour lieux de couchage ou gites, si quelqu'un a.
. Michel Roger, de Joli Môme, au téléphone: "nous allons défendre une position de grève politique, en logique avec ce que nous avons fait jusque là, mais nous ne nous sentons pas en position de l'imposer aux autres et nous aurions plutôt besoin du soutien des autres compagnies grévistes ou non, pour ce faire. Nous ne nous sentons pas non plus la pertinence et la possibilité de saboter le festival de la Chaise-Dieu, mais nous souhaiterions que l'armée des arts y fasse une artiale opération le 16 Aout, avec nous. Ce serait un bel acte unitaire." je trouve aussi. Son numéro: 06.82.33.17.03
. Bref, notre lutte en rejoint d'autres, forcément, et ira sur d'autres champs, et SI VICTOIRE IL Y A DU MEDEF ET DE SES SBIRES FAISONS EN SORTE QU'ELLE SOIT A LA PYRRHUS !!!
11 aout: La fédération à Aurillac. Pour Yvon et JLuc entre autres....
. La Fédé doit/peut-elle envisager de faire entendre sa voix dans les futures Assises de la culture ?... Une précision, si mes souvenirs sont bons: c'est Ralite qui a parlé d'Etats Généraux, Aillagon parle plutôt d'Assises Nationales. Donc, quelques questions...
Les oeufs dans le même panier: faut-il continuer à axer toute la lutte sur le protocole alors qu'icelui, sauf avis juridique contraire, est sur des rails dont il sera bien difficile de le faire bouger ? qu'avons-nous à perdre à commencer à travailler et revendiquer un statut pour l'artiste/technicien du spectacle vivant, fonctionnant sur un financement élargi et pérenne ?
. Face au piège énorme, faut-il tomber avec tambours et trompettes dans le miroir aux alouettes ? ça me hérisse fort, cette éventualité mais peut-être que j'ai tort.
. La Fédé n'est en aucun cas emblématique de la lutte, elle n'a pas brandi le gonfalon guerrier mais, depuis Sotteville, elle accompagne le mouvement, par la communication comme par la logistique, jusqu'à Chalon où elle fait même banquière de la coordination. Accompagner, appuyer, préparer, ce pourrait être son rôle.
. Est-ce que la politique de la chaise vide fera avancer les choses ? c'est une vraie question tant il est vrai que si nous parlons de redistribution des cartes culturelles, nous (les arts de la rue) avons notre mot à dire, étayé par de belles luttes et une bonne mobilisation : si le cri perdure et se développe, il risque de devenir extrêmement énervant pour nos gouvernants.
. Pouvons nous manipuler la manipulation ?
. de tous temps et dans toutes guerres, pendant la bagarre on négociait. La real politik est ainsi faite. Qu'est-ce qui nous empêche de nous battre d'un côté et de discuter de l'autre ? Que croyez vous qu'ils font, les autres ?
D'autre part
. Devons nous nous abstenir de préconiser des mesures d'accompagnement pour certaines troupes et professionnels qui seraient plus en danger ?
. La disparition de beaucoup de salles intermédiaires pour la musique, ça ne nous concerne pas ?
. Et si les forteresses théatro-culturelles laissaient entrer les hordes de laboureurs du trottoir, qu'on mette tout sans dehors dedans... ?
.etc. etc.
.la question n'est bien évidemment pas de baisser sa culotte, plutôt de la brandir, de la rendre turgescente et colorée.
et d'éviter que ne se dessinent des Yaltas sans nous...
Le fait de bouder et de renvoyer Agnafron à son inanité ne manque pas de séduction cependant. J'avais même commencé à lui rédiger une fin de non-recevoir.
Mais.
Pour nous opposer à une oppression de droite nous avons monté des manifs de droite. La contradiction ne nous fait pas peur, c'est sans doute notre meilleure arme.
La dérision fabrique les seules bonnes révolutions.
Donc on va essayer de ne pas être doctrinaire, de se poser la question de la pertinence, du contenu, du suivi, des harmoniques autour du cri, des mots à dire, des mots à taire avec, pour notre propre survie, cette incontestable nécessité: il nous faut d'une manière ou d'une autre transformer l'essai et donner des débouchés à ce qui s'est amorcé.
Il ne s'agit pour l'instant que de cela je crois
18 aout: AURILLAC Total subjectif 1
Quatre jours de "préoccupation" artistique d'Aurillac. 4 jours que je suis là mais pour certains ça a commencé le 12. La préoccupation l'a pour l'instant largement emporté sur l'occupation, quant à l'artistique ... c'est en attente
Une coordination des coordinations s'était installée au palais des congrès, avec moult AG, décisions, propositions... des heures de tchatche, admirable patience. Des très engagés, des représentants avérés mais aussi beaucoup d'auto-proclamés, la Fédération Spectacle CGT, représentée par un Denis ouvert, clair, et qui n'a pas tout à fait perdu son humour. L'humour est une denrée peu cotée en ces temps. Appel à la grève (la grève = le graal ?) mais aussi une prise en compte des rapports de force, ouverture, demande de débrayage pour l'unité. Unité réclamée, proposée, construite, très difficile à réaliser dans le fond parce que procès d'intentions, inimitiés, méfiances extrèmes. Les praticiens des arts de la rue y sont pour l'instant très minoritaires, différences de culture. Pourtant de belles personnalités, de belles générosités et des angoisses déterminées. Une coordination Aurillac créée dans la foulée, on se cherche, rien n'est perdu rien n'est gagné.
"Restons Vivants", c'était "restons" sur Chalon, et l'aventure a évolué, a été reprise, démultipliée, ici nous sommes en anticipation avec un vrai problème de redéfinition . L'impulsion est la même mais on aurait pu s'autodissoudre immédiatement tant les réponses à apporter sur Aurillac se placent différemment, malgré la toute relative force des rituels qui lui sont attachés maintenant (le cri, la manif de droite, l'armée de l'art etc...). Ne nous leurrons pas, "Restons Vivants" passe pour certains pour une assemblée de vieux crabes attachés à leurs privilèges, démultiplication de Chereau et de Bartabas, et certaines prises de paroles ne démentent pas la chose. C'est évidemment faux et ils sont de toutes tailles et histoires ceux qui entre le pilon des décisions gouvernementales et l'enclume des réponses dogmatiques cherchent une bouffée d'air et d'art...
N'empêche que, connement, bêtement, entre opérations séductions et répulsions, nous nous sommes installés dans un jeu de fascination extrêmement pernicieux... L'action nous sauvera, l'action et la tolérance mais les nerfs sont à vif.
La manif interpro de Mardi se prépare. Et de façon plutôt sympa et unitaire...
Hier, à la Chaise-Dieu, Hervée DL et Jacques L. ont avec d'autres, presque réussi le sublime: faire donner un concert classique aux CRS. En Une de la Montagne: une manif des habitants de la ChaiseDieu criant "le Festival Vivra" et un édito parlant du soutien aux intermittents mais aussi d'agacement.
Plus les espoirs s'amenuisent et plus la beauté du combat resplendit. Thorez a bien dit une connerie: Il faut savoir ne pas terminer une grève.
Hier, nous avons crié "non, non et non" à des chaises vides et sous une pluie battante avant le cri. Si la dérision est une arme révolutionnaire, nous sommes en pointe.
Claude Morizur débarque de la Bretagne et nous sort tout net: "Il n'y a pas qu'Aurillac". On vit un psychodrame dont l'importance est énorme pour nous, si petite pour d'autres.
Le festival. On a lu l'appel des salariés du Festival. Il en est ressorti une "cellule de médiation", golem insensé fabriqué à partir d'un bout de coordiniation un bout d'artistes et techniciens in et off, un bout restons vivants, un bout fédé, un bout programmateur, un bout public. Le mérite du golem est d'exister mais marche-t-il ? à peine a-t-il fait sa première réunion qu'une initiative (humoristique ? provocatrice ? idiote ? délibérée ?) en mettait le principe en danger (vol des programmes du festival dont il avait été imaginé qu'ils puissent être brulés, découpés ou autre choses ensemble) ... On n'est jamais tout à fait à l'abri de manipulations et tout accord prend des heures. On se croierait à feu la SDN .
Cet aprem, l'armée de l'art fera ses premiers pas sur Aurillac.
Des compagnies arrivent, en se demandant à quoi ça va servir, qu'est-ce qu'elles vont faire, etc...
Moi j'ai envie de dire que jouer/ne pas jouer est, quoiqu'il arrive, un choix, une volonté, un combat. Rien ne sera facile et c'est ça qu'est beau!!!
19 Aout: AURILLAC Total subjectif 2
300 soldats de l'armée de l'art ont défilé au pas artial à travers Aurillac avant de pousser leur cri. Ce n'est pas l'efficacité que nous jouons, c'est notre dignité.
. Ce matin séance à la Cellule (SDN new-look), une envie très forte d'être ensemble et pourtant... les susceptibilités sont vives, les détresses réelles, les bonnes volontés feintes et non-feintes et ça pisse dans tous les coins pour marquer son territoire.
Il faut qu'on se calme, j'ai envie de dire, et pourtant non, il vaut mieux ne pas se calmer, entretenir la colère... sauf, qu'elle se disperse entre nous la colère.
Deux films des coordinations parisiennes hier, de la belle ouvrage.
Nous avons besoin les uns des autres et pourtant on se croierait à Barcelone pendant la guerre civile espagnole: même si personne ne se flingue vraiment, on sent que...
Et pourtant on est partis pour une manif interpro avec tout le monde... Et je sais que ce sera une magnifique respiration démonstration dans ce petit bout de Cantal.
Hervée nous lit la chartre envoyée par Jacques sur la liste rue. C'est une voix! elle se dresse! on sent de l'élan! on a envie d'y aller. Et pourtant il y a des mots qui fâchent, des mots qui font peur, on a peur de l'élan, c'est ça, on a peur de l'élan, on ne se laisse plus aller. Restons Vivants ne respire pas vraiment. Et pas seulement lui.
Cette qualité de lutte que nous avions sur l'après Chalon, on la cherche, on la veut, on en a désespérément besoin et la savonnette nous glisse des mains dans les toilettes... qui va nous enculer ?
On m'a demandé: faut-il venir ? Je dis : oh que oui! mais attention aux tensions, aux tentations de la facilité. Nous avons un truc à créer, quelque chose de nouveau, un élan, une revendication. Il faut s'attendre à tout et ne pas se barder de certitudes.
Avant de changer le monde soyons bien attentifs à ce que nous faisons de nous!
On a envie de remettre à plat Aurillac cette belle manifestation qui est devenue foire. L'occasion est là mais est-elle là vraiment ? Quand il y a le feu au lac, les architectes rêvent d'en dessiner un nouveau, on ne pourra pas les empêcher, on ne pourra pas s'empêcher et en même temps est-ce là nécessaire ?
Vous avez en direct ici le va et vient aurillacois entre l'exaltation et la déprime. On inspire, on expire, et expirer nous fait mourir un peu. On est de plus en plus nombreux, ça patauge dans les coins, c'est un grand pédiluve dans lequel on vaticine. Où qu'il est le grand bain ? où qu'elles sont les réponses ?
Il n'y a pas d'abandonné au numéro que vous nous demandez, on voudrait se récupérer.
On a les pieds dans l'histoire, l'histoire ce paillasson, on vit des moments uniques et fabuleux, dérisoires et ludiques.
Je ne sais pas comment je vais bosser après, ni sur quel pied jouer, et je ne suis pas le seul.
J'ai l'impression d'avoir remis les pieds sur le Titanic
20 aout: AURILLAC: total subjectif 3
. ça été très dur, la discussion sur la charte chez Restons Vivants. Buratini nous a fait une des ces interventions dont il a le secret, fort de sa sueur et de ses convictions. Hervée a défendu le morceau crânement. Le ton a monté. Ce qui pouvait paraitre comme un axe de rassemblement est devenu ferment de discorde. On est ressorti avec un goût amer sur les lèvres pour rejoindre la manif interpro. Très classique, très nombreuse (2000 environ) avec une floraison d'étendards de toutes couleurs et obédiences au départ. Après, le tri a été fait par la coordination pour ne garder que les banderolles "cultures en danger" "éducation en danger" "santé en danger" "agriculture en danger" "etc... en danger" derrière les banderolles rouges de Joli Môme. Une manif classique, j'ai toujours du mal avec les manifs au premier degré alors que je me suis tellement éclaté sur la contremanif de droite. Enfin! le ciel était beau, les slogans enjoués et les rues d'Aurillac striées de nos présences goguenardes. Un beau moment avec Jean Georges sur la place de la mairie, un cri vengeur, redépart vers la chambre du commerce puis la préfecture. On s'attendait à des paroles plurielles, partagées, parlant des différentes luttes sociales et on a eu droit à deux plaidoyers pour les actions de la coordination auvergne. Les boules.
Le soir un peu, beaucoup déprimé. Thierry Laurent improvise une réunion avec les compagnies officielles pour qu'elles se déterminent. On cause, les problématiques défilent, les visions aussi, et Boubouche nous chante sa version de la Marseillaise - un fou-rire bienvenu-. En gros, il n'y a pas d'envie de faire grève ni même de débrayer, mais un proposition d'action roborative pourrait tout faire changer... ça n'a pas fait avancer grand chose mais, allez savoir pourquoi, je me sentais mieux après.
Passe la nuit et le paysage change. Les spectacles commencent à se jouer d'abondance.
En fait, la crise de mardi a montré que chaque camp n'était pas unanime et ça a ouvert des possibilités.
Ce matin, personne n'avait vraiment envie de clivage. Basta les étiquettes! agissons de concert. Peu à peu ça se met en place, les uns vont chez les autres et on monte des projets. Un plan peinture au blanc d'espagne sur toutes les pubs d'Aurillac est mené par une centaine de personnes. Une cérémonie du lancement du festival assez sérieuse est mise en place et met en jeu les salariés du festivals: deux palettes des programmes du in et du off sont expédiés par la Sernam au gouvernement. 3 fauteuils vides symbolisent l'OMS, le Medef et le gouvernement. C'est un peu lugubre, pas forcément très clair selon l'endroit d'où on voyait ça mais bon...
La fédé anime son forum de la journée, très suivi. On envisage des actions et les initiatives commencent à se multiplier.
Un stand du Club des artistes de Rue de Droite voit le jour rue des Carmes sous l'impulsion de 26000. Il ne désemplira pas. Oui la dérision est révolutionnaire! même si ce n'est pas toujours vrai, ça fait tellement de bien!
Et puis c'est le départ pour le cri: Une file d'intermittents portant veste bleue avec sur le dos un papier donnant leur identité, leur numéro de Congés spectacles et leur date de fin de droit, avance à la queue leu leu en portant une effigie de Tino Rossi devant la figure. Comme dit un membre du public "ça sent le rossi". Une banderolle en fond "les clones ne nous font pas rire". Démarche cérémonielle dans la ville, interloquant, questionnant, décoiffant. On arrive sur la place et Jean Georges nous fait un discours énergique, dynamique, superbe. On est très nombreux sur cette place et il y a beaucoup de public. Le cri est splendide. Des bandeaux rouges sont distribués au public, on recrute pour l'adoption, les infos circulent. C'était un bel acte et il y a un vrai élan dans la foulée. Serge, de la coordination me glisse: "pour la première fois, je commence à sentir que ça va le faire". C'est mon impression, c'est notre impression à beaucoup. Pourvou que ça doure!
Pas mal de nouvelles actions pour demain. Un rendez-vous pour samedi qui devrait devenir l'acmé des luttes avec, sinon une grève générale, au moins deux heures de ville morte à la clef. En tous cas une journée ensemble pour prendre l'élan pour la suite.
Je m'interrogeait ce matin sur le sens de ma venue ici, ce soir non.
ça valse fort à Aurillac
22 aout: AURILLAC: total objectif, presque...
. dans la nuit de mercredi à jeudi; 2 ou 3 excités entrent dans la mairie et mettent le bronx.
. Jeudi matin, un commando de l'armée des Arts non-homologué par Hervé arpente les rues d'Aurillac pour y chanter une version très fraiche de la Marseillaise écrite par Boubouche de Cacahuète. Ce faisant nous risquons la prison. Juste pour prôner la réappropriation.
. Jeudi 14h, début du débrayage proposé par la coordination, un groupe descend de l'école Lacoste et se met en protection de la maison du peuple (la mairie). Action unitaire, beaucoup de monde, chaîne humaine énorme, on chante, c'est très beau très fort.
. Jeudi 15h, le service de presse du festival, convoque les journalistes pour une conférence de presse exceptionnelle à la Centrifugeuse.
. A l'hotel de Ville , un fax est envoyé convoquant Raffarin pour occuper son siège à Aurillac. Le public et tous les acteurs de l'évènements sont invités à attendre la réponse sur place.
. Jeudi 16H, on apprend que Cacahuète doit donner son spectacle sur la place de l'Hôtel de ville, alors que sur les programmes il était marqué à 12H. certains savaient, d'autres pas. L'action va-t-elle être bloquée par le spectacle ? La machine commence à valdinguer cahin-caha, perte de contrôle progressif et consignes contradictoires
. A la chambre des réunions secrètes, un complot s'ourdit en parallèle mais on ne sait pas vraiment ce qui se passe sur l'hotel de Ville.
. Un mini-forum pour savoir si Cacahuète va jouer. Certains proposent de décaler. La direction est là. ça discute de partout. Finalement Cacahuète jouera au grand dam de certains (spectateurs et intermittents) qui après avoir délibéremment tourné le dos au spectacle, partiront.
. 17h30, la conférence de presse se voit interrompre par un comité de l'armée de l'art Guerillac 2003 qui décide une prise de controle du service presse du festival et qui en emmène les protagonistes directo au Palais des Congrès pour une courte séquestration. La presse suit.
. 18h, une délégation spontanée de la coordination déboule furieuse sur le Palais des Congrès exigeant des excuses de JMarie pour la programmation de Cacahuète (elle les obtiendra), stigmatisant la conduite du festival et captant toute la presse qui se trouve ici dans des interviews furibonds. C'est la confusion totale. Les journalistes se régalent. Division is back.
. 18h45: ça ne peut plus durer: appel au calme, forum improvisé lequel sera interompu heureusement par le commando et ses prises qui partent pour une interview en direct de Songy sur FR 3.
. 19h30: il n'y a pas eu d'action pour lancer le cri mais il y a du monde sur la place et l'ambiance est chaude. On cherche à savoir réellement ce qui s'est passé.
Pendant ce temps sur FR3, Songy, encadré par le commando, appelle Raffarin à rejoindre son siège.
20h30: débriefing à tout va. Je suis sur celui de la coordination où l'ambiance est plutôt chaude. L'unité d'action est sur le grill.
On repasse les évènements de la journée pour essayer de savoir qui a fait quoi. Des procès d'intentions fusent à tout va mais, peu à peu, grace à la rigueur des modérateurs et à l'honneteté de nombreux intervenants, on commence à voir qui a merdé (partiquement tout le monde) et comment. ça dénoue les tensions même si est proposé et adopté par l'AG spontané un dénis de résistance au festival. On a parlé, on a pesé le pour et le contre. J'en ressors avec l'idée, peut-être fallacieuse, que c'est encore possible.
Deux jours encore à vivre, de nouvelles actions, la contremanif de droite prévue pour aujourd'hui et probablement une grève générale pour Samedi.
ça chauffe à Aurillac mais pendant les luttes les soldes continuent et les massues volent encore...
25 aout: Fumer tue, surtout l'eau potable
. DIFFERENCE: Aurillac n'aura donc pas ressemblé à Chalon qui ne ressemblait pas à Sotteville qui n'était pas comme Avignon. Moins de bisbille (quoique) et plus d'actions. Si ça ne change rien sur le fond, c'est tout de même beaucoup plus agréable à vivre. Nous revendiquons du plaisir dans la lutte.
. LE SENS DE L'HISTOIRE: si on reprend l'enchainement des épisodes depuis juin, on s'aperçoit que, même si on a eu du mal à le lire, le scénario de cet été était bel et bien écrit à l'avance. Le problème est que sa lecture ne se fait qu'a posteriori.
Nous n'écrivons pas l'histoire, nous y faisons du coloriage.
. UNITE: un des maîtres-mots d'Aurillac, auquel nous sommes presque parvenus, ce "nous" recouvrant ceux qui se sont donnés le temps et les moyens de faire quelque chose avec d'autres. Ceci vient essentiellement de la volonté des radicaux de ne pas s'isoler, de la maturité politique acquise au fil des mois, de la qualité des coordinations régionales qui sont venues nous rejoindre (notamment celle d'IDF), de la présence active et responsable des syndicats, de la volonté de créer des passerelles, du respect acquis au fil des actions entre personnes d'opinions stratégiques différentes etc. etc.
. CEPENDANT: et toute chose étant à relativiser, on l'a vue si faible cette unité, si fragile, à la merci du moindre quiproquo et procès d'intention... Imaginons nous avec d'autres enjeux et dans d'autres contextes: l'Irlande, l'ex-Yougoslavie... j'en ai comme des frissons dans le dos
. UNITE BIS: Si le public s'est déclaré solidaire, on ne peut pas en dire autant de tous les professionnels qui entre deux tournées ou de retour de vacances ont pris l'histoire en court. Ce sont des histoires dans lesquelles il est difficile de trouver immédiatement sa place et dans lesquelles il vaut mieux prendre le temps d'écouter attentivement avant de l'ouvrir. Cacahuète, qui prenait tout ça de haut, traitant les uns et les autres de rigolos, s'est trouvé plongé dans la fournaise abruptement et sans crier gare et, du coup, est devenu beaucoup plus actif soudain, et ce fut une bonne chose.
. DOULEUR: c'est terrible quand elle devient aigreur
. CLIVAGE: la différence entre In et Off à Aurillac est nettement moindre que celle qu'il y a entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas. Il en fut dans les luttes comme professionnellement. Il faut à ceux qui entrent une vraie volonté de se renseigner, il faut à ceux qui trônent une vraie volonté de communiquer.
A Aurillac, bien plus qu'ailleurs, l'information c'est le pouvoir.
. INFORMATION: Restons Vivants revendiquant le fait de n'être pas un corps constitué n'a cherché ni à recruter, ni même à s'élargir, croyant qu'il était suffisamment clair par les actions qu'il proposait. Il nous a manqué une A.G sur le thème de "Restons Vivants". Le résultat est que nous avons toujours une image de club de nantis alors que la question n'est vraiment pas là.
. PARADOXALEMENT: ce fut peut-être une bonne chose. Les actifs se dirigeant tout naturellement vers la coordination en ont élargi l'assise et les préoccupations. Les coopérations se sont multipliées et l'unité a pu se faire, du moins momentanément. Du coup, chacun devrait pouvoir s'approprier à sa façon ce qui n'est avant tout qu'un appel à nous tous, et un enjeu ô combien important.
. UNITE TER: Il est temps de révéler le pot aux roses. Nous faisions tous de la figuration bénévole dans la dernière création du Théâtre de l'Unité: "Papy Jack fait de la résistance" , le scénario s'élaborant au jour le jour, les acteurs furent parfois décontenancés. Qu'ils se rassurent: la production la réalisation et l'équipe technique aussi...
. SYNDICATS: la CGT entre autres et particulièrement s'est vue vilipender à moult reprises au cours des luttes de cet été. Malgré quelques a priori défavorables, j'ai découvert à Aurillac que nos analyses et préoccupations étaient très proches. Philippe et Denis particulièrement ont fait preuve d'une vista, d'un calme et d'une responsabilité exemplaire tant dans la préparation d'Aurillac que pendant. Qu'ils soient ici salués et remerciés.
. CELLULE: je l'ai traitée de Golem et de SDN, cette plateforme totalement bricolée proposée par le festival a tout de même fonctionné, au delà de tout espoir et malgré un grand nombre de ratés. Je ne sais si Jean Marie a sauvé le festival. Je ne sais s'il a sauvé son âme. Il me semble que oui mais... Il serait bon qu'Arillac meurre, tout du moins en partie et ne nous revienne pas intact pour la 19ème édition. Le syndrome d'Avignon nous menace décidemment.
. LISIBILITE: un des maîtres-mots de cet été. Et peut-être une des clefs de la différence entre la coordination et restons vivants. Là où les uns réclament que les actions soient immédiatement compréhensibles, les autres veulent déconcerter et déstabiliser (comme dit Barth). La question est peut-être moins de choisir son combat que de choisir ses rings.
. FUMER TUE SURTOUT L'EAU POTABLE: un cadavre exquis provoqué par l'effacement de certains mots sur un tableau des Vernisseurs, qui avaient monté leur installation à l'école St Eugène. Il en est pour lui comme pour nous, les sens foisonnent.
26 aout: Volez, bois verts!
(en réponse à un mail de Coco du Quartet Buccal, très engagée dans la lutte)Corine tape sur le Festival et sur Restons Vivants et sa critique est fondée.
Je déplore qu'elle associe les deux.
Je déplore qu'elle prenne l'attitude et les dires de certains comme emblématiques de Restons Vivants.
C'est comme si je prenais Michel Roger comme seul porte-parole des coordinations.
C'est faire fi du travail de Georges, de Thierry Laurent, des remarquables actions de Daniel Domingo, de la générosité de Jacques et Hervée, et des Offs et de bien d'autres. C'est oublier les actions mises en place et le temps passé à les préparer.
Le festival a voulu se déterminer comme un festival de résistance. C'est un choix de son directeur et de ses salariés mais, comme c'est un concept relativement nouveau, il est juste de la comparer à Uzès quant au résultat.
Justement, quant au résultat, à l'impact et à l'efficacité sur la suite, peux-tu me dire s'il y a une différence ?
Il n'y a plus d'étendard à brandir, c'est devenu du linge sale à laver ?
Oui le festival a fort cadré voire édulcoré les actions de la coordination. Et j'ai tendance à te suivre sur le trop.
Oui le festival d'Aurillac a été sage, trop sage ? ça sert à quoi d'être méchant dans une préfecture du fin fond du Cantal ?
ça sert à quoi d'être méchant tout court ?
Depuis le début des luttes, je n'ai pas vu de kamikazes, je n'ai pas vu de suicide par le feu, je n'ai pas vu de bloquage des rails ou des autoroutes, je n'ai pas vu d'attentat à la bombe, ni d'enlèvement, ni de meurtre. Au regard d'autres luttes nous sommes tout bêtement risibles, quelles que soient nos actions, des piqûres de moustiques.
Ce que j'ai vu ce sont des grèves, des paroles beaucoup de paroles, des actions revendicatives, des spectacles encadrés par des annonces et des débats, une profession qui parle et qui conteste, noyée au milieu d'autres qui ne pensent qu'à leur problème de survie.
Il y a eu l'impact des grèves jusqu'à la chute d'Avignon. Et quoi depuis, franchement ? noyés que nous étions dans la canicule et les résultats sportifs ?
Si nous avons eu de l'impact ce n'est pas par la force de telle ou telle action mais par leur multiplication.
Je me suis demandé pourquoi j'adhérais à Restons Vivants finalement.
Pas pour son kit des luttes imaginatives, même si j'adore la Contremanif de Droite, la manif des Tino Rossi, les discours de Jean-Georges, l'improvisation et le Cri. Quant à l'Armée des Arts, je la trouve bien dérisoire dans sa volonté de faire sérieux et je lui reproche de s'être plus laissée guider par les uniformes qu'elle portait que par les armes qu'elle brandissait. Ce besoin de faire sérieux nous fait ressembler aux champignons du petit prince et je tiens quant à moi à la dérision érigée en arme.
J'ai adhéré à Restons Vivants parce que je déteste le côté sacrificiel des luttes habituelles.
Ce discours que j'entends, sous-jacent, avec ce concours du meilleur militant - Après Greg le Millionnaire, Kailey le Révolutionnaire ! - Les dettes qui s'accumulent: je me suis battu pour toi, tu me dois... à la fin toujours l'addition se présente et c'est en général pas folichon.
Regardons l'histoire. "Restons Vivants" c'est ce que j'aurais voulu dire aux combattants de la Commune, à tous ceux qui sont parti dans des luttes pleines d'espoir et qu'on a massacrés sans scrupule ni hésitation .
Mais certains me diront: non! les morts font l'humus de la révolution!
Qui veut faire l'humus ici ?
On sait que les pouvoirs constitués n'ont aucun scrupule à tuer qui les gêne. Tous les jours cette pièce se joue. ça fait des milliers d'années que ça dure. Et depuis des milliers d'années d'autres se dressent et luttent pour les contrer et le problème ne fait que se déplacer. J'en ai assez de voir rejouer en permanence la crucifixion des messies.
Tous ces fantômes reviennent avec leur bréviaire, les Mirabeau, les Robespierre, les Fouquier-Tainville, les Marat, les Louise Michel, les Rosa Luxembourg, les Lénine, les Makno, les Trotsky, les Mao, les Ché Guevarra les Pol Pot, victimes ou bourreaux, victimes et bourreaux, tandis que tourne comme un limonaire allègre le grand hachoir à viandes.
On sait depuis des années que les luttes syndicales ne sont qu'affaire de levier. Les smicardes des laveries et pressings pourront débrayer 20 000 fois et n'obtiendront que tchi quand il suffit à des routiers de bloquer quelques axes ou à EDF de faire mine de bouger pour obtenir satisfaction.
J'ai adhéré à Restons Vivants parce que je n'ai pas envie de me faire embrigader dans quelque armée que ce soit, ni dans une guerre que je ne veux pas, que les mots d'ordre simplistes me hérissent (cette façon d'anonner "grève générale" comme si c'était la panacée...), que je crois à une intelligence tactique des réponses et à la manipulation des manipulateurs et surtout que la qualité du combat m'importe autant sinon plus que son résultat.
J'ai adhéré à Restons Vivants parce que je n'avais pas envie de me faire dicter mes actions par les Maitre Capello de la revendication ni d'avoir des bons points.
J'ai adhéré à Restons Vivants parce que j'avais envie de choisir mon terrain et me donner l'impression de réinventer des tactiques, même si ça peut paraitre vain.
J'ai adhéré à Restons Vivants parce que ça me semblait très nécessaire de Rester Vivant justement
J'ai adhéré à Restons Vivants principalement pendant l'occupation artistique de Chalon, parce que s'y écoutait, qu'on découvrait ensemble, que personne n'essayait de convaincre personne, qu'on ne votait pas pour les décisions et que pôurtant c'était toujours la meilleure qui était prise, parce qu'on ne se prennait pas vraiment au sérieux, parce qu'on s'y donnait le droit à l'erreur, parce que j'y ai rencontré des gens disponibles, inventifs et pugnaces, parce que j'y ai trouvé ma place tout naturellement, parce que surtout c'était une expérience collective comme j'en ai rarement vécue.
Je suis venu à Aurillac dans cette idée là.
A Aurillac, le passé nous pesait.
A Aurillac, nous arrivions avec une sorte d'autorité et c'est dur à porter.
A Aurillac, il fallait être sérieux dans les luttes, on ne disait pas seulement "fais-le" on disait "fais-le comme ça".
A Aurillac il y avait de la méfiance et la peur d'être manipulé.
A Aurillac, il y avait l'envie de convaincre.
A Aurillac chacun est arrivé avec sa petite cuisine perso et avec la ferme intention de la défendre.
A Aurillac ça a été dur.
Et nous nous sommes un peu perdus.
Sans doute
Mais qui est suffisamment bien placé pour juger du résultat ?
J'entends bien la vanne de Camille, j'ai du mal avec le jugement de Solenn, et je trouve inutile de nous battre la coulpe.
Il faut continuer.
Rien n'est encore fini selon le but que l'on poursuit. (il sera peut-être bon d'en parler de ces buts d'ailleurs)
Une lutte ça ne se construit pas en 2 heures et nous qui faisons du spectacle savons bien que la deuxième est toujours moins bonne que le première.
26 aout: TU AS RAISON FRANCK !!! (réponse à un mail de franck Esnée lequel attaquait fort sèchement les acteurs de Restons Vivants)
Je me suis totalement fourvoyé. On ne peut pas lutter avec n'importe qui. Il faut d'abord faire le tri.
On ne peut pas lutter avec des gens qui pissent n'importe où, qui citent des révolutionnaires de travers, qui se permettent de créer des actions sur notre misère, qui n'assument rien, qui sont ventripotents, saltimbourges arrogants, accrochés à leur voyage artistique petit bourgeois, qui se font du lard sur le dos des petits, ces antonys qui couinent, ces aveugles qui ne voient pas que seule la révolte brute est esthétique, ces trouillards pleins de morgues, ces enculés qui se permettent d'avoir un passé... Quelle honte putain ! comme tu dis. Ils se cooptent, ils se serrent la louche, ils se refilent des plans, parfois même ils baisent ensemble.
Ces types ne sont pas dignes de se battre avec nous.
Ils sont déjà morts sans le savoir.
A la trappe!
Je te propose que nous nous réunissions, nous les purs, enfin, surtout toi.
Toi tu as l'air très pur! moi je suis déjà louche.
Bref, on se réunit - tu trouveras des volontaires - et on leur ferme leur gueule définitivement à ces cons.
On peut même faire des listes si tu veux.
On les boycottent à mort.
On leur parle plus.
On ne peut pas gagner avec ces traitres là. Commençons par purifier nos rangs et après tu verras la patate qu'on aura.
Je suis ton homme, Franck!!!
MORT AUX MOUS
MORTS AUX POURRIS
MORT AUX TIEDES!!!
9 sept: sommes nous fürk ?
C'est la question qui me taraude: to be or not to be fürk ?
Pour se battre, surtout pour se battre longtemps, il faut aimer la bagarre ou alors être très convaincu.
J'étais à Cognac, en visite de soutien, pour Coup de Chauffe, qui était cette année certainement le plus grand festival Belge de France.
Sur la base de plein air, climat champêtre assuré, les familles s'offraient un picnic de théâtre de rue en picorant tranquillement.
Au pot d'ouverture, René Marion signe un texte percutant, appelant à des propositions et reprenant au mot les propos de Chirac le 14 Juillet, dans le genre: chiche! Et je me dis: qui, à part René, peut bien se souvenir des propos de Chirac et leur attacher de l'importance ? ça parait si loin.
KomplexKaphanaüm très actif transforme son spectacle d'ouverture en prise de paroles partagées.
Il y a une vingtaine de compagnies décidées à jouer mais aussi décidées à lutter. Un chapiteau est dressé consacré au combat mais assez peu fréquenté. On se met d'accord pour une demi-heure d'action autour de 19h30 et le Cri. Qui aura lieu sur le site plutôt que devant la mairie vu que c'est là que sont les spectateurs. Côté symbolique je trouve ça pas terrible mais ça se défend . Côté organisation, pas facile. Chacun arrive au dernier moment. La pluie bouscule les programmations. Résultat: pour le cri de Vendredi, nous sommes peut-être 15 intermittents et 35 spectateurs qui attendent le spectacle d'après. 2 spectacles se déroulent cependant (l'un se terminera par une reprise du cri mais plus tard). L'information a du mal à circuler...
Comme quoi l'information est une conquête à faire, c'est à dire qu'il faut se décarcasser pour se renseigner, au jour le jour, que ce soit dans les arts de la rue (remember Aurillac et ceux qui se plaignaient de ne pas savoir) ou dans la vie courante (chercher les infos pointues plutôt sur RFI et le Monde diplo que sur TF1).
La suite Cognac, je ne sais pas: une action était prévue vers la population le samedi matin et une autre autour du cri. J'imagine que ça s'est mieux passé. Il y avait pas mal de bonnes volontés de gens motivés à la sauce tout de même légèrement déboussolée.
Au cours de la conf de presse, rencontre avec le G 19, groupe des programmateurs de la région, bardés de bonnes intentions, de questions et d'envie. Et puis des années de boulot derrière pour créer un public, une dynamique, toute fragile, la peur que ça se termine...
L'unité dans le refus plus facile que dans les propositions: c'est l'épisode qui nous attend.
Pendant ce temps là, je m'aperçois qu'on a remonté le castelet des gens sérieux où s'agitent les grandes marionnettes again. Assises Contre-assises ! Le syndéac est-il Iago ? l'orchestre des joueurs de désespérance s'est installé en arrière salle. Les ténors s'éclaircissent la voix. Les Coué claquent. Les militantaires affutent leurs affaires. La fédé fédère, pas d'accord pour le concert.
PLein de gens voudraient que l'histoire termine et qu'on puisse reprendre comment avant, différent peut-être, mais sans la boule. Je le sais, j'en fais partie.
Mais c'est pas gagné mes frères...
12 sept: Rafale 1
. Comment le gouvernement nous trimballe: un quart Ferry, trois cars pourris !
. Aillagon reçoit les marcheurs d'Anger, Raffarin les moteurs hybrides... à moins que ce ne soit le contraire. En fait de moteur hybride les annexes 8 et 10 poluaient peu.
. L'Expension tape fort sur la CGT spectacle l'accusant d'avoir des raisons mesquines dans le conflit intermittent. Eh oui, derrière les étendards, chacun arrive avec son histoire
. Sandrine et Thierry sur la liste rue pour un match syndical en 10 rounds. Important. Merci à tous les deux.
. Moratoire et Annulation sont agités devant les discussions: grigris ou munitions ?
. Franck Esnée se colle un rasoir sur la gorge de sa carrière: romantisme révolutionnaire ! Pendant ce temps Jean Marc Adolphe n'oublie pas de se faire éditer.
. Dans les esprits, comme une déprime post-coïtum après l'été. Mais personne ne songe à quitter le lit.
. La valse des coloques , des réunions, assises, contre-assises, AG, commissions, actions : les intermittents font du plein-temps militant. On ne sait plus où donner de l'ardeur.
. Philippe Allari reste vivant à sa manière qui nous amène vers d'autres sphères. C'est de la lutte douce, et elle m'est chère.
. Le protocole c'est dépassé ?
. Jacques Livchine décrète que la lutte est plus intéressante que l'Art. Et ne se contente pas de le dire. L'Unité c'est vraiment autre chose.
. Sur un donjon de rancoeur, certains s'érigent en procureur.
. Aurillac n'a pas fait bouger le dossier. On s'en doutait qu'Aurillac c'était dépassé.
. Remplaçons les festivals par des Flash Mobs
. Les 6 gaulois de Valence, la belle action de cette rentrée!
. Le Cri à Pougne-Hérisson. J'en ai des frissons.
. La soirée d'hommage à Hannah. Je n'y étais pas sinon par le coeur. Quand les femmes meurent, les hommes pleurent. On a tellement besoin de vie.
. Un reportage sur Achille Tonic, sur Envoyé spécial. La gloire après 20 ans de galère, dit le journaliste, et grâce à Sébastien qui les a découverts. Jusque là ils n'étaient supposés que faire des jauges de 100 à 300. Nés d'un milieu populaire, ils sont restés simples et dans la grande tradition des comiques burlesques. Le journaliste ne conçoit la réalité que quand elle passe à la télé. Avant, ce sont les limbes.
Dans la caverne de Platon, ya juste une télévision.
Nous sommes bien, et c'est notre combat, dans une alterculture dores et déjà.
. Quant à moi je suis déglingué total, articulations en folie, boitant comme un malade, bécane en panne à Rouen, tentant de faire survivre la compagnie, assumant les contrats avec autant d'angoisse que de plaisir, et je serai demain à la fête de l'Huma, témoignant des aventures de restons Vivants dans un forum intermittent. La CGT trouve ça important, Restons Vivants. Je ne sais pas ce que je dirai mais j'y serai.
3 déc: Compte-rendu de Manif
Le compte-rendu de l'AFP en parle assez justement même s'ils ne mentionnent pas "Restons Vivants" mais peu importe.
Nous étions donc peu peu nombreux, les ruarts de la région représentant une toute petite vingtaine de personnes dont plus de la moitié d'Acidu. Soit les carnets de commande sont pleins soit... autre chose dirons-nous.
La presse ,par contre, radios, télés et journaux, était venue en nombre, alléchée semble-t-il par l'idée de voir 200 père noel manifester de concert. Une belle intox réussie donc, qui fera plaisir à Jacques. Nous avons été mitraillés et sur-interviewés comme des fous, l'occasion de remarteler et rééxpliquer l'essentiel.
Il y avait du beaumonde de la CGT, très décontenancés de prime abord par la maigre troupe que nous formions mais qui ont assumé crânement. Question organisation, sono, parcours, et presse c'était parfait, toute chose sur lesquelles nous ne sommes pas toujours des champions et pour le contenu, nous avions carte blanche et ça faisait plaisir de voir tout le monde reprendre les slogans et les cantiques détournés avec la banane. Impact assez formidable sur le public familial du mercredi après-midi qui nous regardait avec de grands yeux et le sourire au lèvres. Les CRS, dans le rôle petits lutins (non non les CRS ne sont pas des schtroumpfs) ont été parfaits, aussi nombreux que nous.
La manif était courte, très lisible et assez goguenarde.
Dans le rapport impact/nombre de manifestants, nous avons sans doute battu quelques records. En tous cas l'idée était pertinente et placée directement dans une ligne de popularisation du mouvement.
Autant de raison qui me font regretter que nous n'ayons pas été plus nombreux. Mais bon...
Rendez-vous le 8 pour la suite
15 déc: un p'tit damart pour l'hiver...
Depuis quelques jours sur les listes du fourneau, je me gratte les yeux pour y croire: ked ou quasi. Les échos de la lutte avaient pris toute la place, snobant même les infos d'autre acabit, et c'est le grand silence des mails... Les irréductibles résistent et nous envoient de belles photos mais avouent en même temps que l'action était belle parce qu'il y avait les étudiants...
Parce que s'il n'y avait que les intermittents... Jusqu'à Livchine qui, après 6 mois d'interventionnisme échevelé, conclue par un appel aux urnes - qui restent, malgré tout, le mode d'action politique le plus simple et le plus efficace - avant d'aller à Calais (évidemment pas la corde au cou).
Damoclès met en place son fil à couper le bonheur et chacun s'est plus ou moins fait à l'idée du futur couperet. L'heure de la résistance individuelle à sonné: sauve qui peut le frichti !
Oui: parce que si c'est silence sur l'agora, du côté grelot ça turlute à mort. Bien normal! c'est l'heure des prospections, le marché est ouvert, chacun compte ses billes et voit ce qu'il peut en faire. ça ourdit sec sur les ordis. Ba dame! on est en pleine prospection. C'est l'heure des programmateurs et des chargé(e)s de diff... Et les bonnes vieilles cooptations se mettent en place... et le tout petit monde des arts de la rue fait bouillir ses marmites andis que d'autres mettent au point de nouvelles planches de salut transversales plus conformes à leurs voeux.
Et je me pose la question du bilan, après ces 9 mois d'agitation...
Résultat des revendications: zéro. Côté professions artistiques: tout le monde s'est retrouvé uni par le grand manteau du refus et c'est tout. La fédé s'est renforcée et créée une nouvelle pertinence. Côté individuel, c'est à chacun de voir. Côté arts de la rue ? voit-on s'amorcer de nouvelles pratiques ? de nouvelles manières de se côtoyer, de travailler ensemble, de rêver la rue ? peut-être ben que oui, peut-être ben que non mais pour l'instant , nib! Les notables notabilisent, les discoureurs discourent, les chercheurs de subs orpaillent, les reconnus se reconnaissent, les émergeants émergent et les baltringues errent...
Dites vous le bien: si du côté des arts-frères, nous sommes toujours considérés comme la lie, entre nous c'est kifkif: il y a la variétoche et il y a l'artistiquement correct. Point barre. Et pas besoin que Giscard y postule pour qu'on sache que nous avons aussi notre académie souterraine avec ses immortels...
Et on n'y pourra changer grand chose et ça n'empêche pas qu'il y a de la qualité partout et chez beaucoup.
Sauf que, indécrottable rêveur, j'imaginais autre chose.
Autre chose professionnellement que la reprise désabusée des routines...
Autre chose entre nous que la seule vieille complicité des casernes après 9 mois de service militantaire...
Je n'aime pas ce silence
Me manquent les péremptions de Buratte, les panégyriques vapeurs de Berthelot, les analyses de Georges, les envies, les refus, les envolées, les écoutes, les enthousiasmes, les désespoirs, les disponibilités, les tentatives gratuites, les hurlements, les verres... et le reste.
Tout bêtement.
17 déc: Qu'est-ce qu'ils ont gagné ???
En ce qui concerne l'intermittence:
La lettre au président soutenue par les PS, PC, UDF et VERTS résume assez bien le volet non-romantique de nos revendications, à savoir que cet accord sacrifiera la piétaille en pure perte et que sans que la situation de l'Unédic en soit assainie de quelque façon que ce soit. Le gourvernement et les signataires de cet accord crétin renouent en flamme avec la vieille tradition des ganaches de la guerre 14-18 où on envoyait des milliers de pioupious à l'abattoir juste pour la gloriole. Nous prenons date! (l'avons nous assez communiqué ?). Et qu'on ne nous dise pas plus tard qu'il faut faire plus fort parce que ça n'a pas marché, parce que nous savons déjà que cette stratégie est nulle.
En attendant sortons les parapluies parce que ça va dégommer sec, mais pas forcément tout de suite.
En ce qui concerne la culture:
Jacques , tu nous dis "Préparer un spectacle léger, rentable, agréable, consensuel, c'est ça un bon projet artistique" (en le désapprouvant). Je te rappelle que dans les salles subventionnées, on ne manque pas de spectacles lourds, pas rentables, pénibles et élitistes et je ne sache pas que tu t'en réjouisses particulièrement. Et déjà, dans la rue .... Le cadre culturel a frémi mais il n'a pas bougé. Personne ne tranchera dans le lard. Il n'y aura pas plus de révolution culturelle que de révolution politique. Personne ne changera le monde mais seulement des parties infimes du monde, les plus importantes. Si nos luttes ne nous ont pas changés, nous avons lutté pour rien. Artistiquement, je n'ai aucune envie de voir refleurir l'agit-prop des années 20 et 70. Ce sont tes pratiques, nos pratiques individuelles et collectives qui changeront les choses si nous savons y faire. Je m'inquiète de l'asphyxie des arts de la rue comme de l'étouffement des arts de la salle. Je m'inquiète des prébendes et des routines, non pour stigmatiser quelques uns en particulier mais parce que les rails ont un fort pouvoir attractif et que si nous ne veillons pas au grain, les arts de la rue seront peut-être in finé santifiés et notabilisés mais nous, nous aurons perdu notre âme.
En ce qui concerne la politique:
nous savons que les révolutions se mitonnent surtout dans les cuisines et que les grandes gueules baissent le ton dès lors qu'on leur offre un microphone, qu'il y a 99 agitations vaines pour une petite, une toute petite avancée, et que la qualité de nos luttes est mille fois plus importante que leur objectif, sinon nous rentrons dans le sempiternel fast-martyrs de l'histoire. Difficile d'être partout et sur tous les fronts: les rapports familiaux c'est aussi de la politique, la vie affective, syndicale, professionnelle, c'est aussi de la politique, les atlas qui veulent porter le monde sur leurs épaules se préparent de belles luxations de vie et c'est toujours aux autres qu'ils demandent de payer l'osteo.
Non, ils n'ont rien gagné, mais nous non plus. On ne gagnera que ce qu'on grignotera, au jour le jour.
Pierre PrévostL'ensemble de ces billets et celui de dizaines d'autres intervenants se trouve sur les Archives de la liste de diffusion des Arts de la Rue
cie acidu / théâtre de rue