Les LETTRES DE MA MAISON N°17
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Hantant la ville et les espaces publics, un troupeau de maisons hautes et étroites, qui s'ouvrent comme des boîtes à musique sur des histoires d'amour enfermé.
Les grandes envolées d'un projet passent à la moulinette de la réalité: ce parcours inévitable qu'on appelle création. Chronique de chaque étape.

REPRISE

Karim me téléphone. Nous jouerons « la ménagerie des Coincés du Cœur » à Serris le 16 Mai. Première théâtrale de rue dans cette ville nouvelle qui vit très largement de Disney. Différence d’ambiance certifiée.

Rendez-vous avec Pierre et Laurence, qui programment les Accroche-Cœurs. Un rendez-vous dans un restau sympa et une séance de travail appliquée et complice. Pierre connaît bien le type de problème auquel nous nous confrontons. On fait un petit repérage avec comme hypothèse d’installer la ménagerie dans les douves du château d’Angers : la fosse aux lions. Je repars avec un bon espoir.

Yves Glisière du Mans m’appelle pour prendre les Maisons dans les soirs d’été. Les maisons seraient dispersés dans différents quartiers le jeudi et réunies le vendredi.

Un frémissement bienvenu.

Vous l’aurez compris : nous abandonnons le titre « Les Maisons Hantantes », l’aspect déambulatoire que recouvrait ce titre étant désormais obsolète : maisons trop lourdes et propos qui ne peut pas se promener n’importe où et n’importe comment. Un des compliments qu’on nous a fait au cours des préfigurations était que ce type de propos et d’écriture était plutôt attendu des CDN. Faisons la part des choses mais il y a là peut-être une piste vers la bonne dimension pour ce spectacle : un pièce théâtrale pour extérieur. Nous perdons ici notre côté réjouissance populaire mais gagnerons j’espère une passerelle qui peut s’avérer pertinente.

Il apparaît clairement que les « tireficelles » ne sont pas différents des personnages des maisons. Il n’y a pas de différence entre ceux qui présentent et ce qui est présenté. La Ménagerie des Coincés du Cœur est présentée et développée par ceux qui en souffrent justement. L’effort de jeter un regard objectif n’obère pas la subjectivité, a fortiori la souffrance. Ce sont des malades qui parlent de maladie. Il n’y a pas d’anciens, d’ex, de guéris, pas plus qu’il n’y a d’anciens d’ex-alcooliques. Ceux-ci vous le diront : ils sont alcooliques, même s’ils ne boivent plus la moindre goutte.

Il y a deux façons d’envisager la présentation de la Ménagerie dCdC :

Cruelle : les maisons se côtoient comme des baraques foraines. Elles s’ouvrent et se ferment régulièrement sur une simple annonce et désannonce avec les péremptions comme poivre. Mais personne ne fait le lien, si ce n’est, involontairement, le sniper. Il n’y a pas de discussion, de mises en situation, de dialogues.

Accompagnante : les spectateurs, en jauge limitée (300max) se retrouvent à l’entrée et sont guidés par l’ensemble des comédiens de maison en maison, le sniper faisant perturbateur. Le spectacle est donc une visite guidée de pavillons témoins (très témoins) de la folle souffrance de leur habitant et les comédiens s’adressent régulièrement à eux, d’après leurs propres syndromes, de sorte qu’on ne sait pas vraiment qui est dehors qui est dedans. C’est la direction que nous suivons.

Les deux versions impliquent un déplacement du public. Elles ne peuvent être présentées comme un spectacle fixe avec spectateurs assis. L’absence de dramaturgie ne le permet pas. Il n’y a pas d’intrigue, ni bons, ni méchants, ni rebondissements. Tranches de vie. Têtes de l’art. Le vide, mode d’emploi.

Il n’y aura pas de révolution par rapport aux préfigurations 2005, mais nous allons travailler sur une harmonisation, des surprises et améliorations sur de nombreux points. C’est un spectacle témoin, témoin d’une recherche, d’une démarche, témoin aussi d’une situation des arts de la rue, d’une compagnie, de ses ambitions et de ses moyens et des moyens qu’elle a pu trouver. Spectacle en temps T. Spectacle à tenter (nartürlich) ce que nous ferons crânement et avec toute la passion qui nous érige.

L’espoir ramène sa fraise : tagada !

A suivre...

le dossier en résumé: http://www.acidu.com/fichmaison.htm